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Et avec ça, qu'est-ce que je fais

Un couple, deux êtres différents qui essaient de s’assembler ? 

Un couple, deux êtres différents qui essaient de s’assembler ? 

 

Le couple est un puissant révélateur de nous-mêmes, mais aussi une force d’aliénation à laquelle nous nous soumettons, consentants, plaçant l’amour et son image au-dessus de tout. Pourtant, le couple peut devenir un espace où s’épanouit une communication qui permet à chacun de s’exprimer et d’être respecté pour ce qu’il est, dans la différence ou la complémentarité.

 

Nicolas Bogaerts – photo Brigitte Grignet

 

Finalement, est-ce possible de rester soi-même en étant en couple ?

 

 Auparavant, tout paraissait si simple : être en couple, se marier, participait du mouvement naturel des choses, une étape importante parmi d’autres du cours de notre vie. Être en couple, c’était ne faire qu’un, s’unir, se réunir. Génération après génération, ce système reproducteur de schémas ancestraux est devenu indigeste.

 

L’histoire d’amour qui s’incarne et prend ses aises au sein d’un couple, a désormais le vernis qui craque. Quand on ne se comprend plus, on ne s’entend plus, « c’est la crise ». Alors, stop ou encore ?

 

Thérapeutes de couples, Claudine Marchant et Manu Antoine ont développé un travail original en binôme pour accueillir les couples désireux de placer sur le métier les difficultés qu’ils rencontrent au quotidien. En s’appuyant sur leur pratique, ils nous expliquent toute l’importance qu’il y a à se dire, à laisser l’autre se dire, à ne pas se laisser piéger par ce que nous préjugeons que l’autre va nous dire.

 

 À partir de là, se posent les bases d’une nouvelle forme de communication pour le couple dont il revient aux deux éléments constitutifs, différenciés mais reliés, de choisir ou de renoncer. Pour le meilleur, et rien que pour le meilleur.

 

Psychologies : La crise est souvent le déclencheur qui amène les couples en thérapie ?

 

 

Manu Antoine : En général, oui. Ce peut aussi être un problème précis et passager à éclaircir, ou la conscience qu’il y a une mauvaise communication dans le couple. Claudine Marchant : Nous sentons aussi à travers notre pratique que de plus en plus de couples, parfois très jeunes, parviennent à sentir et constater qu’ils se parlent mal et veulent changer cela avant la crise.

 

C’est bon signe.

 

M.A. : Un simple mot peut être rempli d’une émotion et d’un sens différents selon qu’il est prononcé par telle ou telle personne. Nous partons de là pour inciter l’un et l’autre à dire ce qu’il ressent, ce qu’il n’ose pas dire par simple peur. Chaque ressenti doit pouvoir être approfondi, éclairci et exprimé, pour le bien de la relation. Vous abordez l’histoire personnelle de chacun ?

 

C.M. : Notre image personnelle du couple provient de ce que nous avons observé autour de nous, dans notre famille. Nous proposons donc un exercice très intéressant… et très gai : réaliser un blason qui représenterait l’histoire de deux familles respectives. Chacun est encouragé à constituer son blason avec une maxime, un objet et un animal. Il ne s’agit pas de trop réfléchir, mais de sentir les relations au sein de la famille, avec spontanéité. L’air de rien, on commence à pointer quelle est l’idée que chacun se fait du couple.

 

M.A. : Avec cet outil, ils peuvent commencer à réaliser qu’ils sont deux êtres différents, avec des origines différentes. C’est parfois simplement cela qui est difficile d’assembler. Le décortiquer permet de baisser la pression. Nous entendons souvent, à cette étape, des phrases telles que : « Mais tu ne m’avais jamais dit tout ça ! ».Faire l’expérience de la différence, c’est aussi renoncer à l’illusion qui consiste à penser qu’en couple, nous ne faisons qu’une seule et même personne. Dissocier l’un, l’autre et la relation, est-ce une étape difficile pour certains ?

 

M.A. : Nous leur disons assez vite que nous allons travailler le couple et donc la relation. Nous travaillons beaucoup sur la conscience et l’acceptation de ce que ces deux êtres constitutifs du couple sont différents l’un de l’autre. Chacun est ce qu’il est et qu’est-ce qu’un couple sinon deux être différents qui essaient de s’assembler ?

 

C.M. : Souvent, ils viennent chez nous après s’être rendu compte qu’ils ne pouvaient pas former une seule et même personne. Le début de l’amour, c’est le moment lune de miel, c’est la passion, mais ce n’est pas de l’amour. Ensuite, la réalité vient frapper à la porte : on ne supporte plus les ronflements, les manies, ou que sais-je. C’est un moment difficile à traverser.

 

M.A. : À l’inverse, ce peut être un moment très enrichissant car on découvre que l’on peut s’autoriser des choses qu’on ne pensait pas pouvoir tout en étant en couple : partir en vacances de son côté, faire des activités pour soi.

 

Finalement, est-ce possible de rester soi-même en étant en couple ?

 

M.A. : Bien sûr, mais cela peut être compliqué car nous restons imprégnés de vieux bazars, de vieux schémas antérieurs qu’il est important de clarifier. Mais on observe aussi qu’une génération n’est pas l’autre. Aujourd’hui, on sent que les choses évoluent.

 

C.M. : Auparavant, on ne se mariait pas – ou peu – par amour. On le faisait pour arranger les familles : il s’agissait d’argent, de convenances. L’amour est relativement nouveau dans les couples. Pour autant, il n’y a jamais eu autant de divorces qu’aujourd’hui. Cela montre aussi que l’amour, comme ciment du couple, est aléatoire. Il faut donc travailler autre chose : un lien, un respect. À ce moment- là, on peut naviguer vers un nouvel équilibre. Concrètement, comment parvenir à se vivre en tant qu’individu au sein d’un couple ?

 

C.M. : en osant se dire, tout simplement. Oser dire ce à quoi l’on tient, ses besoins, parler au « je » et pas au « tu ». Et aller vérifier auprès de l’autre si on a bien saisi ce qu’il voulait dire, ce qu’il ressent au lieu de se dire « je le connais, je sais comment il fonctionne »

 

.M.A. : Sinon, cela revient à plaquer une étiquette sur l’autre comme un tampon. Il est important de laisser à l’autre la place de changer, de bouger, d’évoluer. De même, il est crucial de pouvoir se demander : « Qu’est-ce que moi je veux dans cette relation ? Qu’est-ce que je suis prête à changer ? Qu’est-ce que je ne suis plus prêt à échanger ? ».La crise est donc une occasion de déceler tout cela ?

 

M.A. : La crise oblige à énoncer ses peurs : la peur de se disputer, de se montrer sous un autre angle, de changer. La systémique permet de quitter un engrenage qui ne fonctionne plus, pour se mettre dans un nouvel engrenage. De quitter quelque chose que l’on connaît bien, de plus ou moins convenable, plus ou moins confortable, pour aller chercher un autre système. Que l’on pourra, le cas échéant, changer encore plus tard. Ce passage du connu vers l’inconnu, qui nous plonge dans un profond malaise, dans des peurs, beaucoup d’entre nous le connaissent pourtant. Qui n’a pas ressenti cela en passant de l’enfance à l’adolescence ?

 

C.M. : Au début de l’histoire, durant l’amour passion, on aime « parce que » l’autre est comme ceci ou comme cela. Or, à mesure que la vie se déroule avec le quotidien et son lot de routine, de nouveautés ou de tuiles, le vrai couple devient aimer « malgré ». Qu’est-ce que notre relation est capable de dépasser, de digérer et de choisir ? Cela se fait à tout moment et ne se décrète pas une fois pour toutes.

 

M.A. : L’essence de notre travail, c’est de montrer qu’il y a moyen de fonctionner autrement. C’est difficile sans doute, mais après tout, apprendre à nager est aussi difficile. Une thérapie de couple ne sert pas à sauver le couple, mais, qu’on se sépare ou non, à rétablir une communication ouverte.Conseils

 

Recréez un espace d’intimité. Prenez-vous un rendez-vous pour dire et entendre ce que chacun vit et ressent. Faites en sorte de ne pas vous interrompre, dans le respect de chacun. La vie, le travail, les habitudes, les enfants etc., font qu’on oublie et qu’on perd ce contact. Accordez-vous ce moment d’intimité pour parler de la relation, de ce qui est à créer ou à recréer, de ce que chacun est prêt à faire pour le couple, en pleine conscience.

 

Vérifiez auprès de l’autre. Nous sommes tous sujets aux croyances erronées. Nous sommes persuadés de savoir à l’avance ce que l’autre va penser, ressentir, répondre, comment il va agir ou réagir. Pour contrer les malentendus que cela occasionne, il est crucial d’aller vérifier l’information, de donner à l’autre l’occasion de se positionner, de nous donner l’opportunité de le voir tel qu’il est, et de ne pas laisser de place au doute.

 

Venez à temps. N’ayez pas peur d’aller consulter un tiers, pour ne pas figer les contentieux, les blessures et les non-dits. Rester ensemble, se séparer momentanément ou définitivement, cela doit se faire en conscience et dans le respect. Donnez-vous les moyens pour que cela se déroule dans les meilleures conditions possibles.

 

Parlez à la première personne. Dès qu’une émotion émerge, la réaction première est de considérer que c’est l’autre qui la suscite. Or, il est intéressant de se demander ce qu’elle éveille en nous. Privilégie le « je » pour exprimer votre ressenti. Avec le « tu », on entre directement dans le registre de l’accusation qui fige, coince et stigmatise. À la première personne, vous clarifiez davantage qui vous êtes et vous ouvrez un espace où l’autre peut sentir qu’il sera entendu et non plus accusé.

 

www.psychologies.be

 



16/10/2013
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